Ariane, une officière et médecin au chevet des personnes handicapées

Publié le : 17 avril 2020
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Face à l’épidémie de Coronavirus, la Major Ariane Olekhnovitch, 56 ans, a remis sa blouse de médecin qu’elle avait raccrochée en 1992. Spécialisée en gériatrie, l’officière (pasteur) de l’Armée du Salut intervient trois fois par semaine dans une maison d’accueil spécialisée qui héberge des adultes polyhandicapés, en Seine-Saint-Denis. Un renfort de taille pour rassurer les résidents, le personnel et « assurer qu’on en sortira, les encourager à tenir, jour après jour, ensemble ». Un témoignage très humain. 

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Nom, prénom témoignage
Major Ariane Olekhnovitch
Détail sur la personne
Officière à la Direction Opérationnelle du Terrain (DOT) de l'Armée
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Redacteur
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« Je suis médecin généraliste de formation avec une spécialisation en gériatrie. En 1992, mon mari et moi avons reçu une vocation spirituelle. Nous avons laissé chacun notre métier et sommes devenus officiers de l’Armée du Salut, c’est-à-dire pasteurs. Depuis quelques années, nous sommes chargés de coordonner depuis les Quartier Général les actions des postes (paroisses) de la Congrégation de l'Armée du Salut en France. 

La crise sanitaire provoquée par le Covid-19 m’a rendue attentive à l’appel des responsables nationaux de la santé et du directeur de l’Assistance Publique-Hôpital Public (AP-HP), pour prêter main forte au personnel soignant dans les hôpitaux. Je travaillais dans un hôpital de l’Assistance Publique du Val d’Oise avant d’être officière.

En proposant mon aide à la Fondation de l’Armée du Salut, et au vu de tant d’années d’interruption, je n’imaginais pas forcément renouer avec une pratique médicale. Le responsable de tous établissements de la Fondation de l’Armée du Salut accueillant des personnes dépendants m’a demandée de venir en renfort dans notre Maison d’accueil de Montfermeil (MAS), en Seine-Saint-Denis, qui accueille des adultes handicapés très dépendants. Je remplace aujourd’hui le médecin coordinateur qui est en arrêt maladie depuis plusieurs jours. Avec le sentiment d’être bien « petite » pour la situation, j’ai accepté de me rendre dans l’établissement 3 fois par semaine depuis le 2 avril.

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Les résidents et les salariés savent que la situation de confinement va durer longtemps. Une situation à vivre comme un marathon. Il faut tenir bon jour après jour, sachant que le confinement dans les établissements médico-sociaux a démarré bien avant celui de tous les Français. Les visites et les sorties sont interdites depuis plus d’un mois. Pour des résidents porteurs de handicaps, ces limitations et cette privation de l’affection familiale sont source d’inquiétude et de manifestations de comportements perturbés. Dans l’établissement, beaucoup de résidents ne peuvent pas s’exprimer par la parole. Les équipes connaissent bien les résidents et sont attentives à tout changement de comportement. 

L’absence de visibilité sur la fin du confinement ne permet pas de se projeter en disant « Nous allons tenir encore tant de jours ». Certaines interventions chirurgicales ou consultations médicales spécialisées ont été reportées créant de l’angoisse chez les résidents. Les équipes sont courageuses et persévérantes. Elles font face, jour après jour, aux craintes engendrées par l’épidémie, au manque de personnel, à tous les changements que la crise a apportés dans la maison. Le personnel maintient tout ce qui peut illuminer chaque journée : déambulation en costume, chocolats et surprises de Pâques…

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L’aide que je peux apporter dans l’établissement est d’abord d’ordre médical : un conseil sur la santé de tel résident, un diagnostic sur une pathologie cutanée, un trouble du comportement, une douleur. Toute fièvre – dans le contexte actuel – est vécue comme inquiétante pour le personnel car possiblement liée à une infection par le Covid-19. Au-delà de l’aide médicale et des conseils médicaux et de soins, la présence d’un médecin rassure l’équipe et la direction, même si je n’ai pas la réponse à toutes les questions. Le médecin peut plus facilement être l’intermédiaire entre l’établissement et les services hospitaliers lorsqu’un résident doit être hospitalisé ou lorsqu’il réintègre l’établissement après une hospitalisation. Je maintiens les liens et le dialogue avec le médecin de la maison, en arrêt maladie à domicile.

Dans ces moments difficiles, il est important de rappeler que chacun a un rôle à jouer, que l’on soit personnel soignant ou administratif, personnel de restauration ou de ménage, on est tous embarqués dans le même bateau. Dans le désir de faciliter pour les résidents ce passage difficile, chacun est important. Le port de masques pour tous les membres du personnel ne me permet pas de reconnaître tous les visages. Il est même difficile de voir le sourire sur les lèvres lorsque le moral s’améliore. Mais si l’on regarde les visages, on peut voir, ici ou là, les yeux se plisser…On imagine alors le sourire qui en est la cause.

Être présent quelques heures dans l’établissement, c’est aussi établir une relation – même furtive - avec les membres du personnel dans cette traversée, les assurer qu’on en sortira, les encourager à tenir, jour après jour, ensemble. L’espoir reste présent, au cœur de nos missions ». 

Propos recueillis par Mayore LILA DAMJI
 

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