"Par ricochet, les jeunes migrants nous font aussi redécouvrir la chance que nous avons de vivre en France."
Pierre Tapie est président de VersLeHaut, un groupe de réflexion consacré aux jeunes et à l’éducation. Il nous explique en quoi l’intégration des mineurs non accompagnés est une chance, et non une charge, pour notre pays.
En quoi l’éducation est-elle un levier pour l’intégration des jeunes migrants en France ?
Dans le débat public sur les questions migratoires, on parle souvent de régulation des flux, d’hébergement, de sécurité. L’éducation est souvent la grande oubliée, alors qu’elle seule peut donner à ces jeunes qui arrivent sur notre territoire la chance de s’approprier la langue et la culture françaises, de construire un parcours de réussite. Pour leur bien et celui de l’ensemble de la communauté nationale. Ils viennent ici avec une motivation considérable qui leur a fait surmonter des obstacles parfois terribles ; considérons-les comme une richesse.
Au-delà du respect de la personne vulnérable, pourquoi est-ce une chance pour la France ?
La prise en charge des mineurs présents sur le territoire, ,quelle que soit leur nationalité, est d’abord une question de droits humains et de justice. Mais c’est aussi notre intérêt, de les aider à développer au mieux leurs talents. On nous objectera que cela coûte cher… Mais l’échec de l’intégration coûte encore plus cher et l’engagement éducatif en France n’est pas contradictoire avec la nécessité de développer, dans les pays d’origine, des perspectives éducatives et économiques porteuses pour les jeunes générations.
Quelles mesures favorisent ces initiatives d’intégration par l’éducation ?
Une prise en charge psychologique est indispensable pour aider ces jeunes à vivre avec le souvenir des expériences traumatisantes vécues durant leur voyage vers l’Europe. Nous devons aussi mieux les associer aux décisions qui concernent leur prise en charge et leur formation, pour les valoriser et les rendre acteurs de leur avenir. Encore plus souvent que pour les autres jeunes, les mineurs non accompagnés « subissent » leur orientation. En les envoyant dans des filières de formation professionnelle qu’ils n’ont pas choisies, parce qu’elles sont proches de l’hébergement ou parce qu’il y a de la place mais pas forcément de débouchés, on multiplie les risques de décrochage ou de chômage. Par construction, ce sont des jeunes volontaires et courageux : partons de cette énergie pour bâtir avec eux des compétences, qui seront aussi utiles à leur pays d’accueil qu’à leur pays d’origine s’ils y retournent.