Un an d’accueil des femmes à la rue
Il y a un an la Cité des Dames ouvrait ses portes, à Paris. Un accueil, inconditionnel, ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept et réservé aux femmes à la rue. Grâce à vos dons notamment, près de 700 femmes de tous âges ont trouvé un refuge ici, pour quelques jours ou plus, en fonction de leurs besoins. Retrouvez notre reportage.
L’emblématique Cité de Refuge de l’Armée du Salut, dans le XIIIème arrondissement, abrite la Cité des Dames, ouverte en décembre 2018. Dans ce lieu réservé aux femmes, les histoires se frôlent ou s’emboîtent. Elles ont toutes convergé vers ce lieu : la Cité des Dames, gérée par la Fondation de l’Armée du Salut et co-initiée par l’ADSF, l’Association pour le développement de la santé des femmes.
« A Paris, ce centre d’accueil est le dernier des trois centres entièrement féminins où 648 femmes en situation d’exclusion et/ou grande précarité ont été accueillies », précise Christophe Piedra, directeur du centre.
Alors que l’hiver s’installe dans les rues de la capitale, les femmes qui y sont tombées, en même temps que les dernières feuilles, peuvent venir d’elles-mêmes à la Cité des Dames ou sont recueillies par des maraudes et orientées vers ce centre. Ici elles peuvent prendre un repas, une douche, laver leur linge, dormir et consulter un psychologue et une sage-femme.
Elles entrevoient le nouveau début à leur vie
En douze mois, les femmes qui ont poussé la porte de ce centre l’ont fait principalement pour des raisons de santé : « 56,1% des femmes sont venues à la Cité des Dames pour des problèmes de santé. Et 43,9% ont demandé une aide sociale », note l’équipe du centre composée de travailleurs sociaux et des professionnels de santé.
« Concernant les besoins en santé, 43% sont d’ordre médical et 57% relève du domaine psychologique », constate Christophe Piedra.
Fatoussa, 29 ans, est à la rue, elle est en confiance dans ce lieu car « ce n’est pas mixte, je me sens donc en sécurité ici ». Nahime, elle, vient ici « pour se ressourcer » et retrouver une dignité en prenant « une douche ». Elles sont nombreuses comme Fatoussa et Nahime à pousser chaque jour la porte du centre : salariées précaires, sans-abris, migrantes ou victimes de violences. Toutes fragiles, inquiètes, vivant comme l’oiseau sur la branche. Ici, elles entrevoient le bout du tunnel. Elles entrevoient le nouveau début à leur vie.
3 000 sans-abris recensés à Paris, 12% sont des femmes
Des vies brisées, des vies en puzzle dont elles recherchent la pièce principale dans les entretiens avec les professionnels sociaux, de santé ou avec les femmes-repères (des femmes qui ont-elles aussi un jour rencontré des difficultés). Téléphone entre les mains, elles gardent contact avec le monde extérieur afin de ne pas rester que des ombres : un geste révélateur d’une facette de notre époque reposant sur un maillage fragile fait de liens et d’éloignements.
Le lieu est animé par des bénévoles, des travailleurs sociaux et des psychologues, des sages-femmes et des femmes-repères. Leur rôle ? Ramener l’humain au centre, éclairer ce qui reste de vie, d’humanité, dans des vies dont les douleurs sont parfois ineffaçables.
Aujourd’hui, la situation est très alarmante. Les chiffres glaçants : deux sans-abris sur cinq seraient potentiellement désormais des femmes, le nombre de femmes ayant appelé le 115 pour demander un hébergement d’urgence a augmenté de 66 % depuis 2006, sur les 3 000 sans-abris recensés à Paris pendant la Nuit de la Solidarité 12% sont des femmes.
Créer des lieux où ces femmes pourront au moins se reposer quelques heures est donc devenu plus que nécessaire, tout comme le fait de pouvoir ensuite les orienter vers un logement ou un centre d’hébergement où elles pourront rester plus qu’une nuit.
Un an après, la Cité des Dames, ce centre pionnier pour les femmes à la rue, reste toujours aujourd’hui cet îlot de respiration, d’accueil réconfortant.
Mayore LILA DAMJI